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Relire “Globalia” de Jean-Christophe Rufin sous régime covidiste

Globalia

En 2005, invitée lors d’une soirée lecture, j’avais choisi de parler d’un roman récent qui m’avait marquée, Globalia (Gallimard, 2004) de Jean-Christophe Rufin. Un peu plus tard, j’avais eu l’honneur de rencontrer ce fameux médecin pionnier de l’humanitaire qui deviendrait académicien en 2008, alors qu’il était lui-même amené à parler d’un autre de ses romans. Il m’avait confié alors que Globalia n’était pas le roman qu’il préférait. Des années après cette brève rencontre, l’enseignante que je suis continue pourtant à penser ce livre prophétique.

Il est une façon de faire cours de culture générale, de former à l’exercice de la liberté : savoir vraiment lire, apprendre à penser par/de soi-même, ne pas devenir le rhinocéros d’Ionesco à la fin de sa pièce, développer un esprit juste et critique… Ça c’est ce que l’on enseigne. Avec conviction. Avec fierté même. Seulement, voilà, parfois il y a un choc dans le monde réel… Un étudiant me le faisait d’ailleurs remarquer : la profondeur de ce que l’on approchait en cours, et la superficialité ensuite obligée dans le monde du travail, dans la sphère de l’action qui force à mettre de côté ces belles et profondes idées qui vous ont donné pourtant un concours de haut niveau. Sans compter les censures et les mises au ban quand justement l’on ne pense pas comme il faut.

Mais revenons donc à Globalia….

On peut appeler de ses vœux la mondialisation comme cet échange de biens, de valeurs, cette circulation universelle, ce “devenir monde”, l’espérer même avec son horizon d’unité, son élargissement de liberté.

On peut la redouter à juste titre avec son cortège de dérives néolibérales mortifères, ce processus où “les heureux du monde” excluront toujours et encore.

En vous incitant à lire ou à relire Globalia de Jean-Christophe Rufin, j’ai bien conscience qu’oiseau de mauvais augure, je me fais le relais d’un auteur qui a tiré une sonnette d’alarme il y a longtemps déjà, qui a dressé “un état des lieux avant la catastrophe” – catastrophe derrière nous ? Que je me fais le relais d’un auteur qui a annoncé plus de dérives que de promesses de liberté nouvelle et de meilleure communication avec les autres.

Aborder la mondialisation, thème sérieux s’il en est, par le biais d’un roman, ce genre mineur, est-ce d’ailleurs très sérieux ? par le biais d’une “fadaise” comme le redirait certainement Voltaire ? En réalité, je suis persuadée que ce genre littéraire qui tient ici à la fois du conte philosophique ou de la parabole, permet d’aller plus loin que l’analyse froide du seul point de vue économique.

Grâce à la vérité romanesque, l’auteur de Globalia embrasse la mondialisation à travers toute l’épaisseur des personnages d’une histoire, en montre ainsi la portée pluridimensionnelle. À travers un roman d’aventure donc, doublé d’un roman d’anticipation à tendance dystopique.

Un roman d’aventure… ce roman d’un monde ancien, du temps où il y avait une histoire avec un bon début, des péripéties, des vrais personnages, forts et même courageux, et surtout une histoire qui vous happait et vous emmenait vers une fin, une vraie fin, une belle fin. On pourrait presque dire que c’était le bon temps de l’histoire qui avait un sens. Lire, relire Globalia c’est renouer avec ces choses oubliées, comme plonger par exemple dans le dynamisme et la vie de dialogues, des présences qui se croisent.

Tour de force que ce roman où les thèses ne viennent jamais ralentir l’action.

Qu’est-ce que Globalia ?

Sous la bannière de ses deux cent cinquante étoiles, Globalia illustre la société idéale des droits de l’homme et des libertés individuelles, l’ensemble de l’humanité dans la seconde moitié du XXIe siècle. Une devise “LIBERTÉ, PROSPERITÉ, SÉCURITÉ” affiche les valeurs de ce monde global. On parle l’anglobal. “In Globe we trust” peut-on lire sous l’aigle symbole de cette “démocratie parfaite”. Le globalien paie en globar, a des “références culturelles normalisées” ; ne possède-t-il pas “le droit à célébrer ses origines”, droit reconnu comme fondamental ?

Tout y est agréé, contractualisé : “Officiellement je suis agréé-Français” répond l’un de nos héros, Puig Pujols, le preux catalan. Chacun est consulté tout le temps, et sur tout. C’est ainsi qu’on se sent parfaitement libre en Globalia. Rien ne peut être perçu comme négatif. On ne met personne à la porte de l’entreprise mais on “accélère sa carrière”, et de “Minimum prospérité” en  assistances, comme le “CPB”, traduire “Centre de la Promotion du Bonheur”, le chômeur doit encore une reconnaissance éternelle à la parfaite protection de cette démocratie parfaite. Liberté d’expression totale également en Globalia. On a le droit de tout dire et de tout penser. Officiellement.

Éloquent pour bien comprendre ce monde, l’unique juron toléré “Nom de Tous !”, “le seul qui ne heurtât pas une minorité”. Anyway, in Globe, they really trust !

Bref, en Globalia on est HEUREUX ! heureux obèse, heureux vieux, mais sans rides, heureux beau. Oui “la beauté est devenue un idéal accessible à tous”. Il fallait bien en convenir : la jeunesse avec son aspect  “pas fini” était un “mythe absurde”. En Globalia, on exalte “les valeurs de la maturité et de l’expérience”. Donc plus de jeunes. “Et le goût du public s’y est fait. La plupart des gens aiment “la beauté construite”. C’est comme ça qu’on appelle les vieilles. D’ailleurs, sont strictement synonymes les expressions “Vivre vieux”, et “Mourir jeune”.

Dans ce Paradis contrôlé de “mensonges souriants”, tous les jours c’est jour de fête, fête de la pluie, fête de l’enfant, fête des malentendants, avec une fête au carré, la fête de la fête même, le 17 juillet, jour de la commémoration de la mise au point du premier vaccin contre la maladie d’Alzheimer. La Fête Globale.

Dans ce meilleur des mondes, non plus possible mais advenu, il fait toujours beau, d’un beau temps permanent, d’un ciel toujours bleu … grâce aux canons à beau temps !

On ne meurt pas non plus chez ces gens-là, ou si peu : on a le droit à une vie pleine et entière, à “l’épanouissement personnel plus qu’au droit à naître”. “La société démocratique idéale en Globalia était parvenue à un stade de haute maturité fondé sur une longévité maximale” Ces candidats à l’immortalité jonglent avec leurs clones de rechange. La seule inquiétude, d’ailleurs, n’est-ce pas de savoir si quatre clones de rechange seront suffisants. La moyenne d’âge pour avoir un enfant est de soixante-et-un ans.“ La grossesse [y] est un événement à déclaration obligatoire, strictement réglementé”. L’avortement est toujours accepté sauf à de rares exceptions, quand les statistiques de natalité, basses pourtant, ne sont pas tenues.

Perçu comme tyrannique, l’enfant se fait obligatoirement rare pour le bonheur de tous. La jeunesse réduite de Globalia a forcément des avantages : “annulées les tendances à l’instabilité et à la violence des sociétés trop jeunes”. La jeunesse devient “seulement une force d’appoint”, “un matériau destiné à mûrir longtemps et docilement avant de prendre à son tour sa part  de grand avenir assuré désormais à chacun”. “L’enfance devenait non plus un état transitoire, une condition révolue que les adultes auraient été réduits à pleurer leur vie durant, mais au contraire un idéal, une forme supérieure et tardive d’accomplissement que de longs efforts permettaient à tous d’atteindre”. (p.479)

Le monde de Globalia est foncièrement écologiste : on y respecte tous les êtres vivants, animaux ou végétaux. “L’écologie est un des cours principaux dans l’enseignement”. On sait depuis l’école que “l’espèce potentiellement dangereuse [est] l’homme”.

Le monde de Globalia, enfin, est le monde de l’image, des écrans. On est passé de l’ère de la graphosphère à celle de la vidéosphère. Ces antiquités que sont les livres ont été liquidés par ce monde technique et hypermoderne. “En Globalia il n’y a que deux dimensions : le présent, c’est-à-dire la réalité, et le virtuel où l’on fourre tout ensemble l’imaginaire, le futur et le peu qu’il reste du passé. (p. 277)

Qu’est-ce Globalia ? avais-je ainsi commencé. Un monde libre à l’extrême. Mais de quelle liberté s’agit-il ?

La liberté tuant le peuple

“Ce qui m’intéressait, commente Jean-Christophe Rufin, c’était d’essayer de montrer comment un système fondé sur la liberté pouvait devenir totalitaire. Les totalitarismes récents, comme le communisme, étaient fondés sur la norme, la contrainte, l’interdiction. Mais notre période de prospérité et de liberté pourrait bien aboutir elle aussi à la soumission totale : aucun dirigeant globalien n’a de prise sur le destin de son pays, sauf le petit groupe de très grands patrons qui détient les vrais pouvoirs.”

Ce monde d’une liberté érigée en absolu, ce monde sécuritaire, deux amants veulent en fuir l’ennui et l’artifice, en fuir les habitants en réalité “déjà morts ”.  Baïkal et Kate, bien vivants, bien réels, dans l’amour même qui les lie, veulent dépasser ces limites d’un virtuel mortifère, les frontières gardées de Globalia. Ces vivants repérables à leur volonté même de vivre, ce sont précisément les héros dont va se servir aussi l’empire global pour créer l’ennemi dont Globalia a tant besoin pour rester global. Ce corps mou et fade qu’est cette démocratie parfaite, cette société de liberté “qui dilue tout dans son grand bain d’eau tiède”, a besoin de la peur pour tenir les gens ensemble. Il lui faut donc un bon ennemi. À défaut de le tenir, il s’agit de le créer. Baïkal est l’ennemi idéal. “Le montage” dont lui et Kate vont être les victimes presque volkoviennes, est bien huilé et se met en branle.

Fuir dès lors avec Baïkal, puis essayer de le retrouver, de le sauver avec Kate d’abord, avec Helen et Puig ensuite, c’est se rendre compte de la formidable discontinuité de Globalia. C’est prendre subitement conscience qu’il existe un autre monde en deçà de Globalia. Franchir avec nos héros les dômes des territoires sécurisés de Globalia, des grandes métropoles mondiales, constituant ce drôle d’archipel urbain, souvent en panne, il faut bien le dire, c’est du même coup faire l’expérience tragique d’une révélation, celle de ceux qui n’habitent pas dans cette sécurité dorée, c’est pénétrer dans l’insécurité des non-zones, des exclus de cette société regroupés en tribus, prétendument hostiles : les Fraiseurs, les Déchus, les Taggueurs, les Mafieux.

Ces non-zones, à l’inverse, révèlent Globalia dans sa faiblesse extrême : “tout ce qu’il avait découvert dans les non-zones, commente Baïkal, révélait Globalia sous un jour qui rendait cette société haïssable et digne d’être combattue. Quand il avait voulu s’en échapper, c’était avec le désir vague de retrouver une liberté qu’il avait imaginée lui-même. Désormais, il voyait dans Globalia un ennemi, une construction humaine retournée contre les hommes, un édifice fondé sur la liberté mais qui écrasait toute liberté, un monstre politique à détruire.”

Les non-zones servent Globalia et lui fournissent abondamment, vous l’aviez deviné sans mal, produits illicites, polluants, et drogues.

Le tragique de la situation apparaît alors à Baïkal. Où vivre avec Kate ? “le tragique de la vie humaine lui apparaissait dans toute sa cruauté : il était impossible de vivre en Globalia sans perdre son âme mais pour prix de cette renonciation, on obtenait au moins la consolation des objets, le confort, les douceurs de la prospérité. Quiconque se dressait contre ce pacte infâme était rejeté vers ces lieux désolés où la dignité des hommes était payée de laideur, de flétrissement des corps, de souillure et de souffrance.”

Quelle sortie de Globalia ? Quelle sortie des non-zones ? Y a-t-il un salut pour nos héros ?

Monde de la vidéosphère, Globalia va être mis en danger par une résistance à deux visages, celle de la pensée, dont les vecteurs les plus évidents sont l’écriture manuelle et la lecture, et celle de la présence à l’autre dont l’amour est le signe majeur. Dans les deux cas ce qui est en cause c’est l’altérité, la reconnaissance de l’autre.

À ce titre, la création du personnage de Puig Pujols est une vraie trouvaille. Le jeune journaliste renvoyé de l’Universal Herald, privé dès lors en Globalia de tous les moyens de communication modernes, notamment de l’incontournable “multifonction” – à côté duquel le téléphone portable fait pâle figure d’antiquité, le smartphone apparaît comme obsolète – se souvient que sa grand-mère lui a appris à écrire. Trouver du papier, un crayon relève de l’exploit. Qu’à cela ne tienne ! Au rayon bricolage, il trouvera de quoi écrire ; du rayon jouets, il repartira avec “un stylo-fusée interplanétaire muni de nombreux accessoires de combat heureusement amovibles.” !

“Depuis combien de temps n’avait-il pas tenu ainsi une plume contre une page blanche ? Cela remontait à son enfance, pendant les deux années qu’il avait passées chez sa grand-mère à Carcassonne. Elle avait insisté pour qu’il ne joue pas à écrire, comme les autres enfants, mais qu’il apprenne vraiment cet art désuet si longtemps pratiqué, dont tout procédait et qui pourtant avait presque entièrement disparu. La vieille dame et son petit-fils se tenaient près de la haute fenêtre qui donnait sur les remparts. La majestueuse cité avait été bien sûr recouverte par une coupole de verre, mais cela n’ôtait rien à sa magie médiévale. Puig avait adoré ces voyages en rêve, une plume à la main. Il lui semblait s’engager sur d’antiques chemins, en suivant sur le bois blanchi et aplani de la feuille la ligne sinueuse des lettres, en caracolant à la tête d’un convoi de mots, une armée de phrases lancée à l’assaut de l’inconnu.

Le papier qu’il avait acheté était d’assez médiocre qualité, un peu jaune et granuleux. Le stylo ne valait rien non plus. Cependant, quand il sentit son poignet se mettre laborieusement en marche, ses doigts se crisper et les yeux se tendre vers la surface brillante de la feuille, Puig ressentit le même plaisir que jadis. Il lui faudrait un peu de temps pour retrouver son ancienne agilité. Les lettres s’enchaînaient péniblement, lentes et vibrantes comme une lourde charge qui s’ébranle. L’effort pour conduire la plume était si intense qu’il ne pensa même pas à ce qu’il allait écrire. Quand il fut venu à bout de la première phrase, il plaça un point bienvenu. S’étant redressé, il lut à haute voix ces quelques mots qui, d’abord de guingois, finissaient bien raides et debout :

Aujourd’hui, moi, Puig Pujols, je suis libre. (p. 159)

Guidant Kate dans sa recherche de Baïkal en spadassin valeureux, Puig apparaît comme celui qui “a osé penser autrement” et qui met en œuvre ce qui pourra toujours lézarder l’édifice au pied d’argile qu’est Globalia, cette machine à faire du même qui avance toute seule, qu’on ne peut pas arrêter, à laquelle il ne faut rien changer sous peine de la conduire à un effondrement total. L’Association Walden que fréquente Puig depuis son renvoi est le rouage important de la résistance à Globalia : elle conserve les livres. Le livre, l’anti écran, autorise la vraie liberté. Il reste avec la nature le grand éducateur au réel.

“- Dire qu’il y a eu un temps où il y en avait partout… C’est comme les chevaux. Je n’arrive pas à croire qu’un jour, on a pu circuler sur le dos de ces bêtes…Ce n’est pas pareil, avait dit Wise en hochant la tête. Les chevaux ont été remplacés par le moteur.

Et les livres par les écrans.

Non. Rien n’a remplacé les livres.

Quand Puig lui avait demandé comment ils avaient disparu Wise avait répondu :Ils sont morts dans leur graisse.

Et quand Puig lui avait demandé ce qu’il voulait dire, Wise lui avait expliqué tranquillement ceci :

– Chaque fois que les livres sont rares, ils résistent bien. À l’extrême, si vous interdisez ils deviennent infiniment précieux. Interdire les livres, c’est les rendre désirables. Toutes les dictatures ont connu cette expérience. En Globalia, on a fait le contraire : on a multiplié les livres à l’infini. On les a noyés dans leur graisse jusqu’à leur ôter toute valeur, jusqu’à ce qu’ils deviennent insignifiants.

Et en soupirant, il ajouta :

Surtout dans les dernières époques, vous ne pouvez pas savoir la nullité de ce qui a été publié. ”

Les conversions à une pensée “autre” grâce aux livres et à l’écriture manuelle deviennent de ce fait possibles et même rapides.

Aimer enfin, jusqu’à donner sa vie pour l’autre, reste la valeur fondamentale qui fait sortir de soi, qui fait aller au-delà des limites, qui donnent les ressources pour s’échapper, qui fait devenir inventif, surprenant, imprévisible.

Kate et Baïkal, s’aimant “hic et nunc” renvoient à l’ouvrier et à la gamine main dans la main des Temps modernes de Charlie Chaplin. Ils partent, s’évadent, et de l’enfer globalien, et de l’enfer des non-zones vers une nature inconnue, loin de cette culture dénaturante ; ils avancent tous les deux, sur une charrette tirée par deux chevaux. Fin ouverte, dynamique, happy end ! Ils traînent le cercueil de leur ami Fraiseur : promesse de l’amitié oblige, celle de l’enterrer parmi les siens. On ne sait pas où arrivera ce couple primordial, porteur d’on ne sait quelle promesse, mais il avance… et ils s’aiment. Derrière eux donc “la barbarie domestiquée” de Globalia, derrière eux, l’avidité matérielle, “l’insatisfaction abyssale” que produit “un désir permanent, ce désir enflé à l’extrême, qui les écrasait.”

Derrière eux surtout le faux dieu, “ce Ford gravé sur la médaille de Fraiseur”, “celui dont on ne prononce pas le nom”, l’asservissement aux machines et en réalité au dieu Mammon qui personnifie les biens matériels et dont l’homme se fait l’esclave. Derrière eux ce Ford des usines de Detroit, qui, du Meilleur des mondes au film de Charlot, nourrit toute notre modernité.

Ce faux dieu, ils l’engloutissent dans un énorme éclat de rire.

Contrôle total

Cette dystopie s’inscrit dans mon amour étrange pour la science-fiction. Le romancier convoque une intertextualité riche sur laquelle j’ai choisi délibérément de ne pas m’attarder pour laisser émerger l’originalité propre de l’auteur de l’Abyssin. Mais l’on sait qu’on n’écrit jamais vraiment “qu’à l’intérieur de la littérature”.

Le roman rend hommage à sa façon au père de tous ceux qui comme Orwell et Huxley pour ne citer que les plus grands, n’ont cessé d’avertir les hommes de leur folie, de leur hybris primal. On retrouve évidemment en Baïkal, D 509 le héros de Zamiatine, précurseur en la matière avec son fameux Nous autres, écrit en 1926.

Mais ne nous méprenons pas. Point d’utopie ici. Utopie signifie “ lieu qui n’existe pas ”. Ce monde-là existe, il se nourrit de notre présent. “Globalia était déjà là” en 2004 avertissait notre académicien. Que dirait-il en 2021 qui voit le “multifonction” engin de continuité d’une personne et son QR code pister les allées et venues, contrôler l’accès à un hôpital, à une gare, à un aéroport ? engin de contrôle total ? oui total ?