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Incendie de Notre-Dame : quand les heures d’après pensent l’heure critique

Incendie Notre-Dame
Photo H.B.
19h23, 5 min avant que les pompiers ne dirigent leur première lance sur l’incendie.

Voilà une semaine, la cathédrale Notre-Dame de Paris était livrée aux flammes d’un incendie hors-normes. Un joyau du patrimoine quasi millénaire de la France fut en passe pendant quelques heures d’être réduit en fumée. La mise en danger d’autrui fut d’ailleurs telle qu’on n’a pas été loin du drame humain énorme. Certes, les touristes visitant la cathédrale dans les allées latérales et les fidèles assistant à la messe de 18h15 dans la nef ont été parfaitement évacués, mais les pompiers ont risqué plusieurs fois leur vie pour sauver le trésor et pour venir à bout d’un incendie dont la propagation a été infernale. Un quartier entier a été bouclé n’étant autorisé à regagner ses pénates qu’il y a peu.

L’effroi qui m’a habitée pendant ces heures dramatiques ne me quitte pas : l’heure critique d’abord, au pied de la cathédrale, pendant laquelle le feu s’est propagé reste tristement ancrée dans ma mémoire, puis les heures d’après, devant ma télévision jusqu’à deux heures du matin avec l’allocution tardive du président de la république qui n’a sans doute pas été entendue de beaucoup de monde. Enfin, cette nuit courte qui s’ensuivit où vous ne fermez pas l’œil. Que de questions se posent encore !

“L’évidence accidentelle” ?

Alors que des bombes soufflent des toits d’églises qui s’effondrent sur des fidèles en pleine messe de Pâques, pourquoi parler avec autant de force et de mépris de « l’évidence accidentelle » ? Pourquoi éliminer d’office la piste volontaire à l’heure d’actes criminels et de vandalisme, récurrents et récents, comme à l’église Saint-Sulpice et à la basilique Saint-Denis par exemple pour ne citer que les plus importants à Paris ?

Comment interpréter cette coïncidence extravagante que les ennemis du christianisme voient leurs projets réalisés, un lundi saint, en pleine messe, sans qu’ils n’aient rien eu à faire ? Probabilité de loto ! Plus besoin d’attentats, ça se déroule tout seul ! Quelle aubaine vraiment ! Imposer en tout cas une thèse officielle dans un contexte pareil, avant même l’incendie éteint, avant tout début d’enquête scientifique, ne peut que renforcer le soupçon, bien légitime devant l’ampleur de la catastrophe.

Le gros bruit

« Le gros bruit » entendu et dont j’ai fait état dans ma précédente note me poursuit mais je ne peux pas dire plus que le mot « bruit » pour le caractériser. Il venait de haut comme étouffé et des choses – en métal ? – sont tombées. Pas de fumée. Pas d’odeur. L’alarme s’était arrêtée (1). À ce gros bruit, je me suis dit « Tiens, il y a peut-être vraiment quelque chose… » À l’incrédulité, succédait l’invraisemblable (2) qui peut n’être point vraisemblable. J’étais dans la rangée de droite de la nef, encore dans la cathédrale.

Un homme en blouse bleue est venu dire quelque chose au prêtre. Les fidèles de la messe n’étaient pas encore tous partis, la plupart placés au plus haut, dans cette partie réservée à la prière et attendaient le moment improbable où la messe continuerait. Mais très vite, dans les derniers, nous sommes évacués comme les autres, houspillés d’ailleurs par une sécurité fiévreuse qui hâtait le mouvement le plus qu’elle le pouvait. Même l’alarme coupée, la sécurité continuait donc de faire évacuer.

C’est là qu’une fois sortie comme moi une dame, enseignante également, avec laquelle j’avais déjà échangé dans la nef, m’a dit qu’elle partait pour une autre messe dans le quartier à 19h. Je ne l’ai pas suivie, préférant tabler sur une fausse alerte et sur la possibilité de rejoindre le célébrant que nous avions laissé en chasuble et pour lequel j’étais bizarrement un peu inquiète.

Chronologie confirmée

Depuis, nombre de journalistes ont essayé de me joindre pour me faire préciser la chronologie vécue, pour comprendre pourquoi j’avais pu entrer à nouveau dans la cathédrale, après la seule alarme sonore commandant l’évacuation. La chronologie que j’avais alors donnée a bien été confirmée par la suite.

Il est vrai que « ceux de la messe », pour reprendre l’expression d’un vigile qui nous a réinspectés aux grilles – le gros des fidèles s’étant égayé, messe qui avait donc été interrompue lors de cette évacuation – ont pu rentrer à nouveau, après « la levée de doute ». La messe du jour a tenté ainsi de se poursuivre devant une poignée de fidèles. Changement de place pour moi : me voici au premier rang à droite toujours face à l’autel pour pouvoir écouter le prêtre dont le micro est coupé.

Le reste, on le sait. Hurlement au fond de la cathédrale. Évacuation à nouveau. De fait, dehors, les premières fumées de l’incendie se voient. La tragique catastrophe se met désormais en place pour l’anéantissement mathématique de la cathédrale. Mais la Vierge Marie veille et se laissera fléchir par la prière de ses enfants. Les pompiers agissent. La cathédrale sera sauvée.

Deo gratias !

La fumée sort sous la flèche, puis successivement des petites ouvertures du toit. Toutes fument enfin. Puis le ciel s’assombrit à cause de l’épaisse fumée. Les premières lueurs orangées des flammes apparaissent. Le petit vitrail n’est pas encore atteint puis l’est brusquement, les flammes en sortent puis de la fumée. Les flammes avancent de la flèche vers l’arrière de la toiture.

(1) Alors que l’alarme s’était donc arrêtée – comment l’aurais-je entendu autrement ?

(2) Nombre de témoignages commencent ainsi y compris celui de Michel Zink, l’impossibilité que cela arrive.