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Esclavage sexuel sur les sœurs de Saint-Jean : qui pour croire cela ?

Dans un climat particulièrement lourd, en plus d’un livre, d’un film, sort un documentaire sur l’horreur de religieuses abusées. Effroyable ! Là encore, « tout le monde » savait… mais ne disait rien, lit-on. Mais ça y est, les médias, acculés, parlent. Cela concernerait prioritairement l’Asie, l’Afrique mais c’est sur la France que les médias s’acharnent en boucle contre la même communauté, la même branche, les mêmes personnes. Sur des femmes « punies » de manière expresse. On en est à rediffuser aussi et pour la deuxième fois sur Europe 1, la même émission où le journaliste caricature la voix de mon amie à en pleurer. Amie ayant commis des abus sexuels ? Vraiment ? Est-on sérieux ?

Constatons au passage que la pédophilie est donc vite diluée dans d’autres affaires qu’on s’essaie à mettre sur le même plan. Le tour est habile. Quelles affaires de pédophilie sont-elles sorties avec tapage depuis l’affaire Preynat ?

En “prison” sans savoir pourquoi

Saviez-vous que cela existait ? La « mise en prison » de religieux, de religieuses dans d’autres communautés ? Sans savoir pourquoi. Sans avoir accès au dossier d’accusation. Quand cela est arrivé à deux de mes amies chères, j’avoue que quelque chose concernant l’Église a changé, m’a profondément blessée. Chercher à défendre une forme de liberté, des statuts, un charisme, chercher simplement à se défendre devient, surtout quand il s’agit de femmes, désobéissance et orgueil. La sévérité à leur égard me vrille à chaque fois que j’y pense. À l’aune de ce que nous révèlent les affaires de pédophilie, on croit rêver !

Mais aujourd’hui, ce ne serait même plus cela. Aujourd’hui, les voilà accusées avec « des sœurs » (quel pluriel !) d’« esclavage sexuel ». Le journal papier Famille Chrétienne de cette semaine par la plume de son rédacteur en chef reprend l’expression en titre après que le pape eut lâché ces mêmes mots dans l’avion de retour des Émirats devant les journalistes du monde entier.

Que feriez-vous à ma place ? Ce sont vos amies de toujours. Vous les connaissez de toujours. L’une était magistrat et a réussi le prestigieux concours de l’ENM, l’autre était ingénieur, a réussi l’ESTP. Autant dire qu’elles ne sont pas les idiotes « sans formation » que l’on veut faire passer. On voudrait assimiler les scandales qui ont agité la Communauté Saint-Jean à l’affaire Maciel. On voudrait faire passer ceux qui défendent le père Marie-Dominique Philippe et défendent nombre de saints frères de sa communauté comme les mêmes aveugles concernant les Légionnaires du Christ. Mais non. Cela n’a rien à voir.

J’ai fréquenté cette communauté longtemps et m’en suis éloignée en 2009. Si j’avais eu, si j’avais le moindre soupçon, jamais je ne prendrais la parole ici. Certes, les révélations récentes sont bouleversantes, un choc colossal. Les dommages collatéraux dans les familles de ces centaines de religieux et religieuses sont immenses, incalculables. Voici plus de dix ans que les querelles religieuses empoisonnent leurs cœurs. Ce ne sera pas sans conséquences à long terme évidemment. Il n’y a qu’à relire le passage de la Samaritaine dans le grand évangile de Jean.

Le rabatteur d’un pervers sexuel

Mais je ne peux pas imaginer qu’un père fondateur si finalisé, peu enclin aux plaisirs, qui dormait à peine cinq heures par nuit, ascète comme je l’ai toujours connu, dont les chemins de croix le vendredi saint sous le vent cinglant et la pluie froide durait quatre heures, soit le pervers que l’on nous présente. Je ne peux pas imaginer que le père fondateur que j’ai vu prier, célébrer la messe avec tant de dévotion soit le tartuffe que les médias décrivent. Je ne peux pas imaginer que le père fondateur que feu le père de Monteynard appelait affectueusement et respectueusement « ma quatrième blancheur » (1) tant la pureté de ce dominicain d’exception éclatait soit le prédateur sexuel peint. Je ne peux imaginer que le père fondateur si amoureux de la vérité ait été au fond le rabatteur d’un pervers sexuel.

En tout cas, une chose est sûre, je sais qu’il n’a pas pu faire des ex-sœurs contemplatives ses esclaves sexuelles comme l’intitule le trailer de France info allié à CNN ou l’écrivent certains médias catholiques. Mes amies, dont l’une est explicitement accusée de gestes homosexuels, ne sont pas coupables de ce dont on les accuse. Qui pour les défendre ? Qui pour avancer une présomption d’innocence ? Je n’oublierai jamais tel frère qui s’est suicidé après de fausses accusations. Ce serait logiquement à l’Église de porter plainte et de défendre ces innocentes. Mais non, on les laisse sous le feu de la calomnie. À moins que l’on  trouve normal de faire « porter cela dans la prière et le sacrifice » en dehors de toute justice… À moins que l’on trouve normal qu’une réhabilitation n’arrive que des centaines d’années plus tard.

Si l’on se penche sur ces éternels accusés qu’est la Communauté Saint-Jean, que sont les sœurs désormais dites « rebelles », l’on reste pétrifié devant tant de hargne dans une maison Église qui brûle pourtant de partout. Penser sans sourciller, le diffuser à grande échelle, que les supérieures de cette communauté aient pu favoriser l’« esclavage sexuel » est insensé, proprement diffamatoire.

Subterfuge grossier

Que certaines autorités ecclésiales essaient de s’en sortir ensuite en disant que l’abus de pouvoir entraîne l’abus sexuel, ou que l’un vaut l’autre, n’est que subterfuge grossier. Tout abus de pouvoir conduirait donc à l’abus sexuel ? Que met-on sous abus de pouvoir a posteriori ? Toute demande d’obéissance ?

Il y a eu des affaires sexuelles dans cette communauté de frères. Sans doute. Bien moins qu’ailleurs, probablement. Une seule histoire de pédophilie d’après ce que j’en sais. Une de trop toujours. Que des histoires sexuelles sur des femmes majeures, consentantes, soient répréhensibles au regard des vœux prononcés, soit. Ne minimisons rien.

Mais que des règlements de compte aient lieu, que beaucoup n’aiment pas le Père Marie-Dominique Philippe, c’est aussi une évidence. Mais que d’autres en très grand nombre le gardent silencieusement en mémoire comme un saint, on ne l’empêchera pas.

Qu’on relise les choses après coup, qu’on les reconstruise à sa guise susurrées par d’autres n’autorise pas le mensonge sur des personnes qui ne peuvent se défendre, qu’elles soient mortes, qu’elles soient clouées par le vœu d’obéissance.

Qui osera me reprocher d’essayer de défendre l’innocent ?

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(1) cf. le rêve des trois blancheurs de saint Jean Bosco

Dossier de contre-enquête sur le site Chercheurs de vérité

ou ici sur le site père Marie-Dominique Philippe

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