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Repos dominical : la gauche traître ?

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Faut-il en rire ou en pleurer ? Jusqu’à présent la loi de dérégulation du repos dominical portait et revendiquait la signature d’une droite ultra-libérale. Le président Sarkozy s’était démené, avait voulu le travail le dimanche de toutes ses forces. Coûte que coûte. Comme le lui demandait Bernard Arnault le PDG d’LVMH. Comme le prônait Jacques Séguéla. Un député l’avait, en fin de compte, portée en proposition de loi. La loi fut signée au Lavandou un beau jour d’été, un 10 août 2009. Publiée au journal officiel le 11. Souvenons-nous-en longtemps. Une page de civilisation se tournait. Face à Richard Mallié et à ses épigones, la gauche fut alors vent debout avec quelques trop rares députés de droite. Ont plu des amendements, amendements qui aboutirent à l’ubuesque que l’on sait, ubuesque qui aurait dû être consommé dans l’abrogation pure et simple d’une loi inique. Cela n’en prend pas le chemin. Loin de là.

Aux injustices annoncées, comme l’avaient prédit tous les acteurs d’une défense exemplaire, succède désormais le temps de tous les dangers. Joseph Thouvenel vice-président de la CFTC, Étienne Neuville, Jean Dionnot et le collectif des amis du dimanche (CAD), FO, l’avocat Vincent Lecourt, et nombre de députés dont nous entendons encore l’argumentaire de défense, Liberté politique, n’avaient pourtant pas ménagé leur peine pour faire valoir non des arguments irrationnels mais une défense pied à pied des petits commerces, d’un  temps de loisir pour tous, d’un temps gratuit dévolu à autre chose qu’à la consommation, d’un temps qui recrée du lien social.

Le maire PS de Fresnes crée un Puce

Or, voici qu’aujourd’hui – mais nous l’avions vu venir lors de la campagne électorale – la gauche fait tomber le masque et serait bonne première sur la ligne de départ pour ouvrir les magasins le dimanche. La volte-face est formidable ! À preuve, la ville de Fresnes dont Le Parisien rapporte que le maire a fait une demande de Puce auprès du préfet. Un maire PS ! La défense de la gauche en août 2010 aurait-elle donc été mensonge, subterfuge, opposition systématique à la droite plutôt que conviction profonde ? La gauche aurait-elle menti sur le fond ?

Le préfet de Seine Saint-Denis autorise l’ouverture du Millénaire

La nouvelle est inquiétante, comme l’est cette autre annonce, confirmée par la Préfecture : le Préfet de Seine Saint-Denis vient d’autoriser un Puce pour Le Millénaire à Aubervilliers. Pour mémoire, le Millénaire, c’est le centre commercial que le CLIC P (intersyndicale du commerce de Paris) a réussi à faire fermer l’année dernière pour ouvertures illégales des magasins le dimanche. Sauf qu’avec ce Puce, cette fois, le recours devant le tribunal administratif ne serait pas suspensif.

Question prioritaire de constitutionnalité pour des magasins en Alsace

Ajoutons à cela une QPC dangereuse, information relayée par Les Dernières Nouvelles d’Alsace. La question prioritaire de constitutionnalité fait ici semblant de croire que si repos dominical il y a, si les magasins ferment le dimanche, c’est une marque obscurantiste de religion, contraire à la laïcité française. La culture générale fait décidément défaut dans ce dossier et cède sans résister à un pragmatisme destructeur. Qui se souvient que c’est en 1906 avec une chambre “laïcarde”, après des émeutes ouvrières graves, que le repos dominical fut encadré et préservé (1) ? Au nom de la laïcité, le repos dominical ne serait pas constitutionnel prétendent les avocats de certains magasins d’Alsace. Allez dire cela à l’ouvrier ou au salarié corvéables à merci quand le grand patron golfera le dimanche. Une chose est sûre : la gauche sur cette question continue à dévoiler son visage d’indécence et signe sans doute le début de sa fin. H.B.

(1) Daniel Perron, Histoire du repos dominical (L’Harmattan, 2010).