Profs de prépas : lancement d’une coordination nationale
Coup de théâtre à l’École Normale supérieure, rue d’Ulm, ce 29 novembre ! Les professeurs de CPGE ont investi en nombre l’amphi où se réunissaient, pour un débriefing du concours d’entrée ENS 2013, professeurs de CPGE et membres du jury A/L, au nombre desquels plusieurs inspecteurs généraux.
Deux déclarations solennelles ont été prononcées. Celle, d’abord, de Marc Even pour l’APPLS mettant en avant le « caractère exceptionnel » d’une telle initiative et informant de la riposte en cours, très rapide. La mesure Peillon est déjà contestée officiellement par vingt mille pétitionnaires qui s’insurgent contre la possible diminution brutale de leur rémunération et contre le « projet grave » de déstabilisation d’un système de formation dont l’État bénéficie pourtant amplement. Se prépare ainsi le mercredi 4 décembre à Paris, une assemblée générale au lycée Pierre-Gilles de Gennes à 14h, suivie d’une manifestation. Tous les collègues sont appelés à se joindre à cette manifestation. L’intersyndicale dépose un préavis de grève pour lundi 9 décembre, la décision sera prise au cours des assemblées générales, en fonction des réponses du ministre aux syndicats le 2 décembre.
Jean-Marc Wolff, professeur à Henri IV, a ensuite pris la parole pour exprimer la colère des professeurs des classes préparatoires face à une « discrimination au sein même de la fonction publique ». Les professeurs s’indignent d’un projet de dégradation des statuts de l’ensemble des professeurs. Appelant toutes les grandes Écoles à soutenir les professeurs de prépas, Jean-Marc Wolff a, à l’issue de sa déclaration, lancé dans les locaux du lycée Henri IV une coordination nationale regroupant des collègues qui ne souhaitent pas que le mouvement soit uniquement aux mains des associations et des syndicats.
Négociation versus retrait du projet ! Guillaume Bonnet, directeur adjoint Lettres à l’ENS, avait ouvert la réunion quelque peu agacé d’être mis au pied du mur, affirmant néanmoins regarder « avec la plus grande attention » ce mouvement de contestation. S’il concède que les élèves admis à l’ENS bénéficient d’une excellente formation reçue des professeurs des CPGE, il prévient, il ne fera pas de déclaration officielle. « Je ne souhaite pas de débat » ! Nous voilà en effet prévenus : appareils et systèmes ont vite revêtu leur masque autoritaire. Qui parlait de conservatisme ? H.B.
Lien vers le site de la COORDINATION CPGE 2013 créée à Henri IV et appelant à une action le 2 décembre : http://www.netvibes.com/coordinationcpge2013#ACTUALITES
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L’Association des Anciens de Sainte-Geneviève (Ginette à Versailles, vingt classes de prépas) a écrit une lettre à tous ses membres appelant à soutenir les professeurs de CPGE et à signer les pétitions.
Photos : H.B.
Déclaration de Marc Even, pour l’APPLS
Je remercie vivement l’École Normale Supérieure de nous octroyer ce temps de parole à l’occasion de la plénière annuelle et souhaite, au nom de l’APPLS, donner une certaine solennité à la déclaration qui suit, et que je me contenterai de lire.
Une coordination nationale d’associations de professeurs de classe préparatoire, représentant, toutes filières confondues 6000 des 8000 professeurs, rejointe par deux puis trois syndicats très différents a proposé dimanche dernier une pétition unitaire qui est devenue vôtre, parce que vous l’avez sans doute signée. Elle a ainsi rassemblé, entre 16 heures et minuit, dimanche, 5400 signatures ; elle a aujourd’hui dépassé les 20 000.
Ce texte, protestant fermement contre la diminution brutale de nos rétributions induite par la nouvelle méthode de calcul proposée par le Ministère, se termine de la façon suivante, qui donne la mesure de la détermination de tous, et de l’engagement des organisations qui ont charge de nous représenter et nous représentent effectivement :
« Ce projet, en l’état, nous semble exposer à une grave déstabilisation un système de formation qui contribue pourtant de façon significative à la création des forces vives de la Nation. D’autre part, il donne le sentiment d’un incompréhensible et blessant manque de respect pour une catégorie d’agents de l’Etat dont le scrupule professionnel et l’engagement au service du public sont connus et reconnus.
Ne dressons pas les collègues les uns contre les autres: nous ne contestons ni la nécessité de revaloriser les professeurs enseignant dans les zones d’éducation prioritaire, ni, le cas échéant, celle de clarifier le mode de calcul des rétributions.
Nous demandons que la proposition d’une pondération unique et inadaptée (1,5) soit retirée, et qu’une négociation effective permette une prise en compte juste du travail et des qualifications des professeurs de CPGE.»
Les organisations qui sont à l’initiative de cette pétition mettent tout en œuvre, depuis lundi 18, pour amener le ministère à retirer dès lundi 2 décembre un projet qui ne tient compte ni de la diversité des services en CPGE, ni des conséquences inacceptables d’une pondération unique qui placerait quantité de collègues, notamment littéraires, en sous-service.
Elles appellent les collègues à prendre connaissance des résultats de la réunion du 2 décembre et à se mobiliser mercredi 4, localement ou nationalement: rendez-vous a été donné au Lycée Pierre-Gilles de Gennes à Paris. Un préavis de grève a été déposé pour le lundi 9 décembre.
Toutes les initiatives susceptibles de servir effectivement la cause commune sont les bienvenues, mais je crois que la division, et notamment celle des littéraires, est, dans le contexte que nous connaissons, la dernière des stratégies à adopter. Il ne s’agit ici que d’un avis et chacun, dans cette salle, est bien sûr à même de prendre ses responsabilités.
Je vous remercie.
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Déclaration de Jean-Marc Wolff
Nous souhaitons tout d’abord présenter nos excuses à l’ENS et aux membres du jury. L’attitude du ministère nécessite une manifestation forte et rapide de solidarité entre tous les professeurs de toutes les filières des classes préparatoires, venant de la France entière. Cette journée, prévue de longue date par l’ENS, nous en donne l’occasion. Nous n’en avions absolument pas d’autre avant le 2 décembre, où notre sort risque d’être scellé par le Ministre et expédié rapidement par simple décret.
Nous vous demandons donc pardon de nous greffer de cette façon sur votre réunion.
Rassemblés ce jour, vendredi 29 novembre, à l’École normale supérieure, les professeurs de classes préparatoires commerciales, littéraires et scientifiques expriment collectivement par ma voix leur colère et leur indignation envers un projet ministériel qui porte une atteinte sans précédent à leur statut, les discrimine au sein de la fonction publique et bafoue leur dignité professionnelle.
Ils refusent d’être considérés par leur employeur comme des privilégiés spoliant leurs propres collègues. Jamais un ministre de la République n’avait prétendu jusque-là améliorer les conditions de travail d’une partie de ses agents en baissant autoritairement le salaire d’une autre partie d’entre eux.
Ils s’indignent d’un projet qui, dès maintenant à travers le Plan Peillon, entraîne en fait une dégradation du statut et des rémunérations de l’ensemble des personnels de l’enseignement secondaire.
Les professeurs des classes préparatoires refusent donc toute négociation sur un texte qui, dans son esprit comme dans ses modalités, constitue une négation de leur engagement au service de l’Éducation nationale et de leurs étudiants.
Ils appellent, par leur présence en ces murs, toutes les grandes Écoles et toutes les Universités à soutenir les professeurs de classes préparatoires, qui, à leur niveau, celui des L1 et L2, contribuent à améliorer chaque année la formation initiale de près de 75000 étudiants, et à alimenter avec elles le précieux vivier des ingénieurs, des professionnels de la gestion, des chercheurs et des professeurs, dont notre nation a tant besoin.
Ils exigent que les syndicats et les associations de professeurs de classes préparatoires soient reçus par le Ministère, et demandent à ces derniers de les soutenir pour exiger le retrait pur et simple du projet ministériel en l’état.
À cet effet, ils ont décidé de se rassembler au sein d’une coordination nationale. Cette coordination aura pour objet d’encourager et d’engager toutes les actions revendicatives qui, dans les établissements et au-delà, viseront à l’abandon du projet et à l’arrêt de toute négociation sur son dispositif.
Les professeurs non concernés par la réunion de cette après-midi vont se réunir dans la salles des conférences du Lycée Henri IV pour commencer à préparer cette coordination.
Ils invitent tous les collègues ici présents à les rejoindre à l’issue de leur réunion avec le jury pour la fonder, tous ensemble.