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Philippe Delaveau : la poésie, quête de joie et de sagesse

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  C’était au tour de Philippe Delaveau d’être l’invité du cycle « Grands poètes d’aujourd’hui » et de  satisfaire au principe de ce nouveau Lundi de l’Arsenal. La BnF entend rendre ainsi hommage aux poètes vivants et témoigner « de la vigueur, de l’éternelle jeunesse et du renouvellement d’un genre, la poésie, qui, non content d’être le lieu de la plus grande créativité littéraire, fait aussi écho aux questions de notre monde » La conférence, ponctuée de lectures de poèmes, de musique, est en ligne sur un site très riche.

 

  Parmi les questions posées à l’auteur de Ce que disent les Vents (Gallimard, décembre 2011), retenons celles tournant autour du choix de la forme avec ses rejets, ces ruptures, l’accumulation d’indépendantes, des asyndètes, des phrases nominales (curseur 20’10). Jean-Yves Masson, menant l’entretien, demande au poète s’il ne s’agit pas de « casser une trop grande continuité », de « donner l’idée que ce après quoi le poème court ne se laisse pas rejoindre » Réponse de Philippe Delaveau :

« Je suis hanté par ce monde fragmenté, ce monde qui est empli de failles et le fait que tout soit brisé, cette notion de désastre de la modernité ; il y a une souffrance du monde ; et dans les différents arts, je crois qu’il y a ces marques de brisures ; c’est caractéristique de l’art moderne et contemporain : on ne peut donc plus faire des pièces lisses, faire des choses complètement fermées sur leur grand état satisfaisant… On doit introduire la blessure à l’intérieur de l’œuvre pour essayer de répondre à cette blessure, pour apporter ce qui sera cette joie au terme ; il faut intégrer ce qu’est la souffrance des contemporains, c’est vraiment une des grandes missions de la poésie ; ce n’est pas commode, il faut que le poète soit très disponible à tout ce qu’il va entendre, à commencer par ce fait que la personne humaine est brisée, qu’elle est morcelée… »

Jean-Yves Masson poursuit : « Est-ce que la tâche de la poésie est de  guérir cette blessure ? prendre acte de la déchirure de l’homme moderne sans essayer de la cacher ou de la dépasser. Est-ce qu’elle est dépassable ?

 

« Oui je crois. Les poètes comme tous les artistes reçoivent un appel à quelque chose. Il me semble que ce n’est pas d’abord le fait de réenchanter le monde, car je crois que les Parcs Disney font cela mieux ! … Je crois qu’il y a une parole de poésie particulière qu’on retrouve dans la tradition française, chez les poètes français, « Sois sage ô ma douleur », le « sois sage, c’est étonnant… le fait de retrouver la sagesse… Je suis très hanté par les psaumes, par le rythme de l’hébreu. Je crois qu’il y a quelque chose de tout à fait contemporain dans les psaumes ; à la fois, celui qui dit « je », qui n’est pas forcément le poète, cette présence d’une conscience à soi, d’une conscience au monde qui est celle de tous, et puis cette tentative de trouver une forme de sagesse pour répondre. C’est peut-être une folie mais je crois qu’il y a cette ambition dans la poésie, on la trouve à travers les siècles… Quête de sagesse. Quête de joie… »

Poème « La joie » lu par l’auteur sur Youtube « J’ai désiré la joie et il y avait l’amertume »

Cycle Grands poètes d’aujourd’hui : Philippe Delaveau

Conférence du 14 mai 2012 en ligne sur le site de la BnF

Entretien avec Jean-Yves Masson, lecture Ghislain de Fonclare, chant et musique Roula Safar