Mariage pour tous : réponse ouverte à Pierre Bergé
Interrogé sur le mariage pour tous par Ruth Elkrief sur BFM TV hier soir 8 novembre (vidéo ci-dessous, curseur du début à 9’35), l’emblématique Pierre Bergé, « profondément laïc », a voulu donner des airs propres à une loi qui n’en a aucun.
D’entrée de jeu, interrogé sur « la polémique qui enfle », le Président de la Fondation Bergé-Yves Saint-Laurent avoue son inquiétude. Mais l’argument selon lequel François Hollande aurait eu tort de ne pas faire voter la loi dès son élection, dès juin ou juillet, ne convaincra personne. Les opposants au mariage gay auraient eu le temps de fourbir leurs arguments, avance-t-il. Rien de plus faux car cela fait des années que le débat est nourri, que les publications se sont succédé, celles de philosophes ou de pédopsychiatres avertis. Derrière l’argument de l’ancien ami de François Mitterrand, il y a sans nul doute la volonté de faire se regarder deux débats de société et de rappeler celui de la peine mort où effectivement l’élu PS de 1981 s’était bien gardé de demander son avis au peuple et avait fait voter l’abolition de la peine de mort comme premier acte de sa mandature. Un esprit averti verra à quel point cette volonté de superposition des deux questions n’est pas juste. Stratégie manipulatoire. Une de plus.
Qui existe de moins en moins ?
Autre argument : on aurait permis aux opposants « de se regrouper », « aux Églises qui existent de moins en moins de trouver une manière d’exister ». Quel coup de pied de l’âne ! Le venin cynique des petites phrases, des menaces indignes même, fera sans nul doute son chemin. Mais retournons contre son auteur de telles paroles qui ressemblent bien d’ailleurs à celles d’une autre église, secrète celle-là, celles du Grand Orient de France cette semaine. N’est-ce pas l’inverse qui est en train de se passer ? Le lobby qu’on avait gonflé médiatiquement jusqu’à plus soif n’est-il pas en train de crever comme la grenouille de la fable quand les chiffres avancés sont enfin vérifiés ? Qui existe de moins en moins ? Qui ne représente qu’une ultra-minorité ? Pourquoi Pierre Bergé s’érigerait-il en pape très écouté et dénierait-il aux autres le droit de parler ? Les allures soignées des derniers interviewés sur BFM TV ou dans le dernier débat de la chaîne parlementaire ne peuvent leurrer très longtemps ni faire oublier les désordres d’une communauté loin d’être unifiée.
Mauvaise foi du pacsé d’Yves Saint-Laurent
Vient enfin, après une définition provocatrice de l’homosexualité, « pas d’abord de l’amour, mais de la sexualité », l’argument cliché mais si utile de l’égalité avec l’emploi étrange du mot « classe ». « Pourquoi y a-t-il deux vitesses ? » s’insurge notre grand patron engagé à gauche. « Pourquoi une classe serait-elle réservée aux hétérosexuels, une classe aux homosexuels qui n’auraient pas le droit de monter dans le même wagon ? » interroge le Président du Sidaction. Ruth Elkrief a beau poser les bonnes questions autour d’une « égalité qui ne serait pas similitude », de l’altérité en péril, convoquer les hommes de gauche en vue très perturbés par ce projet de loi, rien n’y fait, le pacsé d’Yves Saint-Laurent persiste dans la voie de la mauvaise foi : « Les hommes de droite étaient tous contre le pacs, hormis Roselyne Bachelot, “une femme intelligente ”, et tous aujourd’hui vous disent que c’est très bien » ! Ce qu’oublie de dire le copropriétaire du Monde, c’est que le gros de la troupe des pacsés ne concerne précisément pas les homosexuels. L’on comprend dès lors que la droite ne soit pas revenue dessus !
Marginaliser les anti, normaliser les pro
Une chose est sûre, la bagarre ne fait que commencer : on nous dit à longueur de flashs info que le gouvernement reprend la main, que des auditions parlementaires vont s’organiser en arrière-fond de celles du groupe de travail de l’UMP qui gênent. Marginaliser les opposants, normaliser les pro mariage gay, voilà ce qui attend les deux camps, stratégie qu’une majorité de journalistes va essayer de mettre en œuvre. À moins que la vérité du mécontentement n’ait enfin les relais légitimes ? Sait-on jamais ! H.B.