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Mariage pour tous : clivage politique ou clivage sociétal

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Débat (pseudo !) sur “Le mariage pour tous” dans l’émission “Les Retours du dimanche” sur France culture : curseur du début à 33’58, avec une très courte intervention de Jean-Pierre Winter dont nous copions également ci-dessous l’extrait d’une interview en ligne sur le site Car et Med (Carrefours et médiations)“Aujourd’hui tout est brouillé : on bafoue le réel !”

 

Que pensez-vous des questions qui agitent la Société sur l’homoparentalité ?

 

J.-P.W. En tant que psychanalyste, je n’ai pas à me prononcer sur le mariage entre homosexuels. En revanche, à partir du moment – et c’est le cas – où derrière cette mesure se profile le droit à l’homoparentalité, c’est-à-dire le droit pour ces couples d’adopter ou de se faire faire des enfants, j’ai le devoir de dire ce que cela m’inspire au regard de 25 années d’expérience clinique. On ne peut pas balayer d’un revers de la main ce qui a fait le fondement de notre société pendant des millénaires. Et quand je vois des politiques se prononcer hâtivement, je m’interroge sur leur sens des responsabilités. Un mot quand même sur le mariage homosexuel. On nous explique qu’il faut l’accorder au nom de l’égalité des droits : tous ceux qui s’aiment doivent avoir droit au mariage. 

 

Mais de quel droit s’agit-il ? Avec la reconnaissance du mariage homosexuel, on passe de la notion de droit individuel – le droit au mariage pour chacun – au droit du couple en tant que manifestation amoureuse. À partir de là pourquoi ne pas aller plus loin ? Pourquoi ne pas autoriser le mariage à tous ceux qui s’aiment ? Pourquoi ne pas autoriser la bigamie ? Le mariage entre frère et sœur ? J’exagère à peine.

 

Venons-en maintenant à ce « droit » à l’enfant revendiqué par les homosexuels.

 

Le droit à l’homoparentalité enfreint, pour moi, un principe intangible qui est tout simplement celui de la réalité. Cela revient à dire que l’impossible – jusqu’à nouvel ordre, il faut toujours un homme et une femme pour faire un enfant – est possible ! Je suis bien placé pour savoir que la souffrance psychique d’un enfant est très souvent liée avec ce qui se passe dans le lit de ses parents. L’enfant dans un couple d’homosexuels saura toujours qu’il ne peut pas être né de la relation entre ces deux êtres-là. Qu’il doit chercher ailleurs son origine, sa généalogie. Or les couples homosexuels – on le voit à travers les moyens qu’ils utilisent pour la procréation (banque du sperme, mère porteuse ou géniteur de passage) – ont tendance à exclure celui qui a contribué génétiquement à la naissance de l’enfant qu’ils vont aimer et élever. Il est paradoxal qu’au moment où l’on veut faciliter la recherche parentale pour les enfants nés sous X ou pour les enfants adoptés, on organise un type de famille d’où le géniteur serait exclu. Plus grave encore : on enlève à l’enfant les moyens de nommer sa parentèle. Comment appellera-t-il le compagnon de son père, la compagne de sa mère, leurs frères, leurs sœurs ? On nous rétorque que l’on inventera des mots. Mais ces mots de toute façon bafoueront la réalité généalogique. Parler de droit à l’enfant pour des couples homosexuels revient à nier l’importance de la filiation dans la construction psychique d’un enfant. Cela ne sera pas sans conséquence. On parle du droit des homosexuels. Moi, je défends le droit des enfants à avoir un père et une mère.