La Manif Partout : Opération Portes et Ponts de Paris réussie
Un regard furtif par la fenêtre. Il pleut. Il n’est pas encore cinq heures mais il ne faut pas traîner. Vite, j’avale un café, sac au dos, écharpe rose, et voilà la journée commencée dans la nuit noire d’un petit matin pas comme les autres. J’ai répondu présente à l’Opération surprise de La Manif Pour Tous et Partout. Mais quelle sera-t-elle, me dis-je en attrapant le premier bus ? Keep calm ! La révélation approche maintenant ; la surprise n’en sera que plus forte. J’ai confiance. Six heures. L’équipe au complet se réunit dans un café de la Porte d’Auteuil. Nom de code : Opération Portes et Ponts. Attentifs, les visages jeunes sont déterminés, les responsables, chefs d’équipe, chefs de zone, que j’ai nommés Matthieu 1 et Matthieu 2 dans mes contacts, insistent sur les consignes de sécurité, soignées, à l’équerre. Plus de trois cents volontaires pour toute l’opération se préparent à investir Paris dans ses Ponts et dans ses Portes. Tout commence dans l’obscurité et la lumière timide d’un jour qui peine à renvoyer cette nuit qui cache encore notre secret supérieur.
Ici Paris, les Français parlent au François
La Police pourtant sait. Nous voici avertis qu’elle fait des histoires à notre chef de zone alors qu’il vient de partir chercher les grandes banderoles flanquées de leurs slogans roses ou bleus. Une heure qu’on attend. L’équipée serait-elle annulée avant même de commencer ? Pourtant Twitter envoie déjà messages et photos : tout est très bien engagé, #radiolondres, « Ici Paris, les Français parlent au François. » Les premières vues arrivent des ponts investis. Matthieu 2 rassure, explique, annonce la conférence de presse de Frigide Barjot sur la Seine, à bord d’une péniche. Un bien beau plan ! Ce serait trop bête d’être freinés. Mais non, c’est bon. La banderole arrive : il ne faudra pas l’accrocher, juste la porter. C’est chose faite un quart d’heure plus tard. Le temps perdu semble subitement rattrapé. Tout s’accélère. La circulation devient dense, les embouteillages du périphérique ne sont vraiment pas un mythe. Nous en profitons. Les automobilistes par milliers ont tout loisir de lire : « Vive la parité et d’abord dans le mariage ! » Klaxons sympathiques, gestes d’encouragements, accompagnent nos deux heures de présence. Mais j’entends soudain une sirène caractéristique, vois le gyrophare : la maréchaussée a décidé d’une nouvelle descente, vient cette fois-ci, et pour de bon, confisquer l’une de nos deux banderoles.
Réflexe, déguerpir au plus vite. Pendant qu’une banderole est confisquée, nous ne demandons pas notre reste et nous échappons du lieu avec la deu
xième, cherchons un lieu écarté pour la plier. Ce sera chose faite très vite. Tout en pliant, je me demande combien des banderoles d’Act Up les policiers ont ainsi confisquées, ce qui a pu motiver une telle mobilisation des forces de l’ordre sur la zone Asnières, Champerret, Auteuil. J’ai déjà ma réponse…
Sous les ponts de Paris
Mais « le bien est fait » pour reprendre le tweet de Tugdual Derville, même s’il a manqué trois quarts d’heure du temps prévu pour l’exposition des slogans dans tout Paris. Quant à Frigide Barjot à bord d’une péniche, son pari symbolique de passer l’Assemblée nationale mais aussi la Cathédrale Notre-Dame est réussi. Elle aura passé en revue de très nombreux ponts parés – 157 bâches ont été déployées sur les ponts de la Seine et ceux du périphérique (1) – pour une bataille cruciale qui s’annonce aujourd’hui même à l’Assemblée. La police empêchera bel et bien notre Porte-parole de mener jusqu’au bout son projet de sensibilisation du peuple parisien. Mais qu’importe ! La surprise, non la provocation et la vulgarité, a fait son œuvre ; l’événement ne manque en tout cas pas de panache. Fort engageant à quelques jours des rassemblements du 2 février devant les Préfectures et des cinq cent mille signatures à collecter pour le CESE ! Courage ! Ne lâchons rien… H.B.
(1) Chiffre officiel communiqué par La Manif Pour Tous hier soir.
Photos : H.B.
Addendum 4 février : vidéo H.B.