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Gaudi – Le mystère de la Sagrada Familia

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Le cinéma Arlequin proposait mardi soir dernier une avant-première du documentaire Gaudi – Le Mystère de la Sagrada Familia. La productrice Sophie Dulac et le réalisateur étaient présents après la projection pour répondre aux questions d’une salle médusée. Les images de Stefan Haupt avaient en effet attiré une salle comble. Le projet fou d’Antoni Gaudi, génial architecte catalan transformant le projet d’une petite église expiatoire en énorme basilique, fascine de plus en plus et le rendez-vous proposé n’a pas été manqué à plus d’une semaine de la sortie officielle, le 14 mai prochain.


Le film met au cœur d’un projet unique l’inachèvement, la construction en cours qui attire trois millions de visiteurs par an. Historique, le documentaire explore les différentes péripéties auxquelles sont confrontés architectes, ouvriers, sculpteurs depuis le début de cette incroyable épopée architecturale. Les difficultés n’ont pas manqué durant plus d’un siècle et ne manquent toujours pas même si une date d’achèvement peut désormais se dessiner à l’horizon des années 2030. « Dieu n’est pas pressé » se plaisait à dire Gaudi lui-même.


Mais cela adviendra-t-il ? Les oppositions ne continuent-elles pas bizarrement alors que les soucis de financement tombent ? À côté des témoignages très précieux des premiers acteurs de l’aventure Gaudi, ces aspects-là du film nous ont marqués particulièrement. Retenons-en trois.

 

D’abord ce collectif d’architectes demandant dans un article de journal l’arrêt de la construction de la basilique. Quelle déception d’apprendre que Le Corbusier en était ! Les détracteurs s’unissent donc pour mettre en échec la construction : certains dénigrent par exemple le mélange des styles et voient dans le chantier qui prend lentement forme une sorte de « parc d’attraction » ! Les critiques ne sont pas dénuées de dépit comme le révèle par exemple la signature de Subirachs, Subirachs qui acceptera paradoxalement d’être à partir de 1987 le sculpteur de la très controversée statuaire du portail de la Passion … de continuer le projet donc…

 

Ensuite, le forage d’un tunnel pour un train à grande vitesse passant sous la basilique tout près du portail SOS Sagrada familiade la Gloire actuellement en construction. Tout l’édifice peut s’en trouver fragilisé. Les recours juridiques sont évidemment déposés mais la ville de Barcelone fait la sourde oreille et les travaux continuent de plus bel pendant ce temps-là. Une campagne de sensibilisation a bien eu lieu avec ce SOS géant déroulé sur l’une des flèches terminées de la basilique en 2010.

 

Enfin, et c’est cela qui nous peine le plus, un certain nombre de voix s’élèvent pour que la Sagrada Familia ne soit pas un simple édifice catholique. Il faudrait que ce lieu soit « plus social et moins religieux ». D’autres émettent l’hypothèse qu’un carrefour œcuménique ouvert à toutes les religions correspondrait davantage à nos temps modernes. On reconnaît bien là les préoccupations d’une modernité empreinte de l’humanisme athée de ceux « qui ne croient pas au Ciel » avec des arguments déjà entendus en France concernant la basilique de Montmartre par exemple. « Pour qui, pour quoi » cette Sagrada Familia, quand les idoles vulgaires comme le foot par exemple traversent, si présentes, la ville ? La question est posée par Haupt dans une construction circulaire au début et à la fin du documentaire ; sa position reste finalement assez ambiguë pendant tout le film. Mais n’en déplaise aux adversaires, la basilique mineure consacrée par le pape Benoît XVI en 2010 est bien catholique.


Accompagné de la messe en si de Bach, le documentaire s’offre en tout cas comme un hymne à la beauté, un hymne aux artisans, aux ouvriers entièrement finalisés par l’œuvre à réaliser. En ce sens le témoignage d’Etsuro Sotoo prend un relief particulier. Venant du bouddhisme, ce sculpteur des anges du Portail de la Nativité a fini par se convertir au catholicisme en entrant toujours plus profondément dans le mystère de cette création hors du commun. L’admiration pour Gaudi, palpable dans les mots de celui qui ne fait qu’un avec la pierre, en a été l’un des principaux ressorts. « Là où Gaudi regardait, je devais regarder aussi »… Les mots de l’héritier le plus fidèle ? Le cœur battant du film ! H.B.


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Voir également mon diaporama – Voyage février 2012 en cliquant ici.

 

Gaudi – Le Mystère de la Sagrada Familia, bande annonce. Sortie le 14 mai 2014.