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Chrétiens d’Irak : entre indifférence et impuissance ?

 

Nous sommes tous des chrétiens d'Irak

À Rome, en avril dernier pour la béatification de Jean-Paul II, la visite dans l’église Saint-Barthélémy-en-l’Île d’une exposition dédiée aux nouveaux martyrs du XXe siècle s’était imposée. Les chapelles latérales de l’église protégeaient de leur concavité les nouveaux noms des témoins de la Foi de chacun des continents du monde.  

 

Le Ministre des Affaires étrangères muet


Ce périple spirituel bouleversant – notamment la halte devant l’une des pierres qui a lesté le corps du Père Popieluszko dans la Vistule – me revient en mémoire alors que nos frères du Moyen-Orient sont massacrés aujourd’hui au nom de leur foi. Nous nous indignons bien sûr, participons à la vaine mousse médiatique portée par les réseaux sociaux, prions, irons manifester à Lyon ou à Paris, jeûnerons, donnerons de l’argent à l’AED mais cela changera-t-il vraiment quelque chose ? Nous tremblons devant la réponse qui se dessine, ayant espéré contre toute attente dans les puissants de la politique, constatant que les puissants ne font rien comme par exemple le ministre des Affaires étrangères présent sur un plateau de télévision hier soir ne pipant mot de la tragédie en cours…

 

Entre l’attitude passive et défaitiste qui consiste à ne rien faire parce qu’il en sera toujours ainsi d’un mal déchaîné jusqu’à la fin du monde ou l’attitude activiste qui se donne bonne conscience à moindres frais, ceux qui meurent « gâchant un peu le goût de nos plaisirs » comme le dit la chanson, quelle est la bonne façon de faire ? On ne sait et le sentiment de terrible impuissance monte, nous gangrenant méthodiquement le cœur. Que payons-nous de nos personnes pour aider nos frères de Mossoul un tant soit peu concrètement ? Pas grand-chose lorsqu’on se penche sur les informations du matin : les choses piétinent à en pleurer. Que faire vraiment d’efficace ?

 

« Ta houlette me rassure »


Prier d’abord comme nous y enjoint le pape François, mais surtout porter les gardiens de la Foi que sont nos évêques dont la mission est de monter au créneau en cette circonstance tragique. Leur mission propre ne consiste-t-elle pas à protéger, promulguer, défendre, propager la foi chrétienne ; ces chères brebis du troupeau, ne doivent-ils pas les faire paître ? Leur houlette n’en est-elle pas le signe fort ?

 

Un geste inattendu de leur part les honorerait, pourrait faire bouger le concert des nations singulièrement amorphe en cet été 2014. Le pauvre « N » de « Nazaréen » que les fidèles arborent sur les réseaux sociaux ne saurait en effet suffire. Osons donc respectueusement proposer. Chaque évêque ne pourrait-il pas se délester d’un signe d’honneur – comme d’une dérisoire légion d’honneur par exemple dans une marche symbolique vers l’Assemblée nationale ? Pour obliger les députés à se dessiller les yeux, que reste-t-il à poser comme acte sinon un geste plus fort que les mots d’une tardive chronique dans un quotidien ? Un geste nouveau (celui-là ou un autre), prophétique – semblable au jet des couronnes dans l’Apocalypse – qui obligerait le gouvernement à répondre, l’acculerait à l’action diplomatique forte ?

 

Ne pas s’enivrer du sang des martyrs


Car nous ne pouvons continuer à nous laisser éberluer par le beau titre de martyr : si des martyrs nous ont précédés, la souffrance des saints ouvert la voie, ce n’est pas pour que nous regardions leur témoignage de manière esthétique ou pieusarde : nos frères en train de mourir là-bas ont envie de vivre, veulent que vivent leurs enfants. Ceux qui ne sont pas encore morts nous appellent au secours le couteau sur la gorge, la balle tout près de leur nuque. Le titre de martyr qui pourrait un jour les qualifier – dans trois cents ans ! – ils s’en fichent. Ça urge !

 

La semence de Foi ne pourrait-elle pas aussi germer non de morts de sang mais d’un geste courageux de protection et de salut hors-normes de nos évêques issu de la force de tous les martyrs déjà réunis au Ciel ? Ainsi, qu’un sang déjà tant répandu ne nous enivre pas, qu’il monte auprès du Seigneur pour le faire fléchir. Qu’on n’en ajoute pas.

 

Que la Reine des Martyrs intercède et accompagne ainsi l’action de ceux qui l’imagineront et la mettront en œuvre. Vite ! Porter secours à nos frères « nazaréens », n’est-ce pas le nôtre que nous préparons ? Le couteau sur notre gorge… c’est peut-être demain… H.B.

 

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Addendum 1er août

Vidéo “Les nouveaux martyrs du XXe siècle”