24 mars : Le “superbe démenti” de La Manif Pour Tous
« Je n’ai jamais servi autant de chocolats chauds ! Vingt-cinq litres de lait écoulés ! » Ces mots prononcés par la serveuse du café où nous nous étions réfugiés après la Manif sonnaient vrais. Nous sortions du café et nous avions effectivement bu des chocolats chauds ! Sur le pont depuis dix heures du matin en tant que volontaire, j’étais littéralement frigorifiée comme la dame de Perpignan assise à la table voisine ayant participé à toute la manif avec sa valise à roulettes. Elle faisait l’aller-retour dans la journée. Chapeau bas.
Assignée par mon chef d’équipe d’abord Esplanade de La Défense, j’ai assisté médusée au flux ininterrompu de la foule débarquant à pied ou du métro par La Défense. Les premiers manifestants, tranquilles, déboulèrent vraiment vers 12h30 pour grossir de manière impressionnante vers 13h45. Le tunnel de l’Avenue Charles de Gaulle vers le Pont de Neuilly et vers la Porte Maillot absorbait une foule de plus en plus colorée, de plus en plus compacte. L’Arc de Triomphe au loin se découpait fier de lui dans un horizon brumeux, témoin neutre de ce qui se jouait d’historique devant lui. Pas si étonné que cela. Il avait déjà vu semblable foule et l’antique monument croyait bien se souvenir que ce fut alors un record répertorié : le concert de Jean-Michel Jarre avait bel et bien attiré deux millions cinq cent mille personnes ! Et on essayait de battre le record ? Ça l’intriguait pourtant que ce fût pour défendre ça ! Ils sont fous ces modernes…
« Ne touchez pas à l’essentiel ! »
Autorisée à rejoindre l’avenue de la Grande Armée – le nombre de volontaires étant alors suffisant pour le flux de manifestants – je m’engouffre dans le métro à La Défense et débarque en moins d’un quart d’heure Avenue de La Grande Armée par le métro Porte Maillot, encore ouvert. 14h09. Quelle joie ce bain de foule, foule déterminée mais joyeuse, sereine ! Des pancartes de tout côté. Des enfants heureux avec leurs ballons, des jeunes fiers d’arborer leurs bracelets en caoutchouc roses ou bleus Manif Pour Tous. Banderoles sur les balcons : « Taubira, pas les enfants ! », « Ne touchez pas à l’essentiel ! », « Liberté justice, fraternité ! » Certains sont allés jusqu’à composer en famille un tub Manif pour Tous comme cette grand-mère qui parodie pour ses petits-enfants Cadet-Roussel a trois maisons : « Ah, Ah, Ah oui vraiment /Je sais qui sont mes parents ! » Plus rares, quelques pancartes ouvertement polémiques : « Hollande, Taubira, démission ! ». C’est une marée humaine, le peuple fait corps, il vient de partout : de Bretagne, de Pornic, de Sceaux, du Gers, de Chamalières, de Pithiviers…
Je réussis enfin à me faufiler et à me planter devant un écran géant. 15h37. Impossible de remonter vers le podium. Impossible de rejoindre des membres de ma famille venus de province déviés avenue Foch. Commencent alors les interventions toutes plus intéressantes les unes que les autres dans leur diversité. Mention spéciale pour celles d’Henri Guaino (15h56), d’Hervé Mariton et du juriste Patrice André qui dans sa splendide compétence et son humour décapant n’a pas manqué de montrer les aberrations vers lesquelles nous allons – et qui sont déjà là dans d’autres pays ! Ça tweettait sec aussi hier. C’est comme cela que j’appris qu’il y avait des échauffourées Place Charles de Gaulle et Avenue Foch. La plupart des manifestants ne le surent pas au moment précis où cela se passait. Jean-Marie Guénois du Figaro, qui est loin d’être un excité, a témoigné par quatre tweets en direct son indignation qu’on puisse utiliser des gaz lacrymogènes sur des familles et des enfants en poussettes. Re-tweeté deux cent trente-neuf fois !
Avenue de La Grande Armée, tout continuait pendant ce temps-là plus efficace que jamais. Des appels au calme furent cependant bientôt lancés avec demande explicite de reculer et de ne plus monter vers le podium. Les écrans géants les relayèrent sur le champ. Frigide Barjot elle-même prit le micro pour expliquer. Superbe Frigide de bout en bout ! Personne ne fut pourtant très inquiet, l’impression de sécurité l’emportait.
Le Président de la république aux abonnés absents, fuite du garde des Sceaux
Le clou de la journée fut évidemment l’appel au président de la république. Frigide Barjot ne recule, on le sait, devant rien. L’une des porte-parole du Collectif La Manif Pour Tous voulait représenter cette foule jusqu’à perte de vue et demander au président de la république un rendez-vous. Hervé Mariton rappela à ce propos le camouflet infligé l’hiver dernier. Lors de la marche des députés, les députés avaient été reçus à l’office de l’Élysée. L’élu de la Drôme espérait à présent que le nombre impressionnant des manifestants ferait bouger le curseur. Il n’en fut évidemment rien. Frigide Barjot eut beau composer le numéro de l’Élysée, François Hollande était aux « abonnés absents » ! Le sketch tout comique et symbolique qu’il était marqua néanmoins les esprits.
Le soir commençait à tomber. On s’acheminait déjà vers la fin du rassemblement. Oui rassemblement et non défilé. A posteriori, on mesure le piège que fut pour un nombre pareil de manifestants le choix par la préfecture de police de cet itinéraire-là qui ne fut qu’un immense goulot d’étranglement. Incombe évidemment à ses services et à ces hauts gradés qui affirmaient la veille qu’il n’y aurait que 100 000 manifestants de n’avoir pas octroyé d’espace plus large. Et le plus large c’était évidemment l’avenue des Champs-Élysées. À quoi mènent l’entêtement et l’aveuglement !
Non, rien de rien, non on ne lâchera rien !
Le final fut extraordinaire avec son hymne attendu. 18h08. On l’espérait, fin prêt. Les paroles et la musique en ligne sur le site de la Manif Pour Tous n’avaient aucun mystère pour nous. Opportune mise en ligne pour la jeune génération qui ne connaît peut-être pas aussi bien Édith Piaf que l’ancienne ! Grand moment d’émotion bien sûr. « Non rien de rien, non, on ne lâchera rien ! »
Non, rien de rien… C’est dit ! Gare maintenant à ceux qui mentent au peuple. « Personne au monde ne saurait changer la Vérité » H.B.
Réécouter l’émision de Radio Notre-Dame “Le Grand témoin” du 25 mars2013 sur l’analyse des chiffres..
Avec le général Bruno Dary et Tugdual Derville.