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Père Jacques Hamel : “Me voici !”

père Jacques Hamel

Dans la tradition de l’Église, les communautés religieuses du monde entier lisent chaque jour le martyrologe. Sont égrenés alors les noms des saints et saintes de Dieu fêtés durant le jour et dont on fait mémoire. Certes, le livre ne recueille pas seulement la liste des seuls martyrs sanglants. Les témoins de la foi à fêter, si divers, forment un peuple tellement immense, saints vivant actuellement de la vie même de Dieu, dans ce ciel que l’on nomme aussi paradis. Les catholiques croient à la communion des saints, à la puissante intercession des amis de Dieu pour toujours.

Configuré au maître et au serviteur

Le père Jacques Hamel a-t-il rejoint ce céleste cortège qui s’est avancé avant lui « vers le Roi des Cieux », comme on peut le chanter ? Tuer un prêtre parce que prêtre – ce qui est arrivé à Saint-Étienne-Du-Rouvray – conférerait-il la palme suprême à ce ministre du Seigneur ? Nous le savons, le sang versé pour la foi en Jésus-Christ, sacrifice ultime configuré à celui du maître et du serviteur, lui donne une valeur incommensurable. Symbole supplémentaire : le père Jacques a été égorgé dans une église dédiée à saint Étienne. Prêtre depuis cinquante-huit ans, il venait de fêter un jubilé rare de fidélité à son sacerdoce, sacerdoce vécu de manière modeste. Prêtre, jusqu’au bout de son ministère…

Martyr en grec signifie témoin. À propos du martyr d’Étienne, premier martyr de l’Église, Benoît XVI disait ceci lors de l’année de la Foi (mai 2012) :

« La vie et le discours d’Étienne s’interrompent à l’improviste lors de la lapidation, mais son martyre est précisément l’accomplissement de sa vie et de son message : il devient un avec le Christ. »

Ce pourrait être dit du père Jacques qui meurt vêtu des habits liturgiques de prêtre, ensanglantés désormais.(1)

L’égorgement violent, impromptu, sur les marches de l’autel, à l’issue de la messe, tel l’agneau du sacrifice renvoie à l’Agneau de Dieu que nous prions avant chaque communion. Dans la foi, nous croyons qu’il enlève le péché du monde. En égorgeant le père Jacques qui n’a pas cherché la mort, les terroristes savaient qu’ils touchaient le cœur de la foi catholique, c’est évident. En même temps, ils ne savaient pas tout ce qu’ils faisaient, ne croyaient sans doute pas qu’était ajoutée à l’acte, pourtant définitif de rédemption du seul sauveur, une surabondance de miséricorde à laquelle nous pouvons participer. Le sang alors versé, irriguant mystérieusement désormais un peu plus cette terre de France, et le monde entier, nous le savons, fécondera puissamment les cœurs. Le martyre n’a pas été recherché – comment le pourrait-il ? – mais son irruption incompréhensible, correspond vraisemblablement à un temps de Dieu que nous recevons sans tout saisir au moment où cela s’accomplit.

« L’instant de vérité »

Quand Benoît XVI avait à Ratisbonne essayé doucement, intellectuellement, de creuser une fois encore les liens de la foi et de la raison, critiquant « l’absolue transcendance » de l’islam avec ses potentiels germes de violence, appelant à une « ample raison », que n’avait-il pas dit ! Accusé de tout bord, le tout nouveau pape touchait pourtant le cœur du problème.

C’est sur ce mode que Monseigneur Vingt-Trois réagit au sortir de la réunion des représentants des cultes à l’Élysée. L’archevêque de Paris emboîte le pas au souverain pontifie d’alors. Le cardinal ne se place-t-il pas en effet strictement sur ce terrain de la rationalité anthropologique ?

« L’instant de vérité que nous vivons, c’est de savoir à quel Dieu nous croyons. Est-ce que nous croyons à un Dieu de mort ou à un Dieu de vie ? Est-ce que nous croyons que Dieu se réjouit de la mort des hommes et récompense ceux qui les tuent ? Ou est-ce que nous croyons en un Dieu qui veut faire vivre l’homme et soutenir ceux qui combattent pour la vie humaine ? » …

Il n’y a rien de raisonnable en effet à croire qu’un dieu puisse, à la manière des faux dieux païens et des idoles, se réjouir de la mort des hommes, mort qui est toujours un mal, un scandale.

L’alternative proposée par l’archevêque de Paris, dans sa tranquille liberté interrogative, cherche à susciter non pas d’abord une réponse de foi mais une réponse raisonnable et universelle. Un dieu de vie ne récompense pas ceux qui tuent en son nom. Qui peut croire le contraire à moins d’être fanatiques, fous, de ces nihilistes haineux qui disent en réalité dans leurs cœurs « Il n’y a pas de dieu » ?

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(1) 26 juillet 2016 Couleur liturgique du jour : Blanc. Couleur liturgique des ornements utilisés au temps de Noël et au temps pascal. On la retrouve aux fêtes de la dédicace, de la Vierge Marie, des anges, des pasteurs, des docteurs de l’Église, des saints et des saintes qui ne sont pas martyrs. Le blanc évoque la pureté, mais plus encore la Gloire divine et l’éclat de tout ce qui touche à Dieu. C’est la couleur de la résurrection.

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Bertrand Révillion (Rédacteur en chef de Panorama) sur Facebook

Je songe à cette “dernière messe” de ce vieux prêtre. Je songe à sa “première messe” il y a plus de 50 ans le lendemain de son ordination… Une vie offerte, donnée et soudain fauchée. Oser, le cœur empli de révolte, dans le silence de la prière, les mots du “Magnificat” pour cette vie consacrée. Pour cette coupe versée…

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Lire sur le site de Famille chrétienne “Michel Onfray : le drame de Rouen ne rendra pas lucides les aveugles.”

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Lire sur le site de La Vie l’éditorial de Jean-Pierre Denis “En mémoire du père Hamel, témoin de la foi.”

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Lire sur le site de 20 minutes “Attentat de Saint-Étienne-du-Rouvray : l’égorgement un mode opératoire à la portée symbolique”

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L’intervention de Jean-Frédéric Poisson (Président du PCD) sur LCI,

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Martyrologe du 26 juillet 2016

Sts Anne et Joachim, mère et père de la Sainte Vierge
St Georges Preca, prêtre et fondateur († 1962)
BBx Edward Thwing et Robert Nutter, martyrs († 1600)
BBses Marie-Marguerite et 4 comp., martyres († 1794)
St Éraste, disciple de saint Paul (Ier s.)
St Siméon (Simeone) , moine et ermite († 1016)
St Austinde, évêque d’Auch († 1068)
BBx Évangéliste et Pérégrin, prêtres et ermites († XIIIe s.)
Bx Hugues des Actes (Ugo de Actis), moine († 1250)
Bse Camille (Camilla) Gentili, martyre († XIVe ou XVe s.)
Bx Jean Ingram, prêtre et martyr  († 1594)
Bx Georges Swallowell, martyr († 1594)
Bx Guillaume Webster, prêtre et martyr († 1641)
Bx André, catéchiste vietnamien et martyr († 1644)
Bx Pierre-Joseph Le Groing, prêtre et martyr († 1794)
Bx Marcel Gaucher Labigne, prêtre et martyr († 1794)
Ste Bartolomea Capitanio, vierge et co-fond. († 1833)
Bx Emmanuel Martin Sierra, prêtre et martyr († 1936)
BBx Vincent Pinilla Ibañez et Augustin Recollet, martyrs
Bx Titus Brandsma, prêtre carme et martyr († 1942)