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Incendie de la cathédrale Notre-Dame : le signe du coq

Le 13 novembre dernier, France Télévision nous a offert un programme comme la télévision sait trop rarement nous donner. L’émission spéciale Des Racines et des Ailes, entièrement consacrée à la Cathédrale Notre-Dame de Paris ravagée par les flammes le lundi saint dernier, fut parfaite.

Parfaite dans ses sublimes images de drones, parfaite dans ses commentaires savants et accessibles. De l’émotion lors de l’incendie, de la consolidation “aux rescapés de l’incendie” soit les rosaces inestimables et la “Vierge au pilier” intacte, la plus ancienne des statues, aux statues miraculées des apôtres, à la consolidation avant restauration… Tout ne fut que délicatesse, finesse d’analyses, loin des polémiques. Le spectateur était sous le charme restant jusqu’au bout, jusqu’au passionnant reportage de la reconstruction à l’identique de la flèche de la basilique Saint-Denis. Le chantier maître ?

Cette soirée fut un beau succès d’audience pour France 3 comme le révèlent les chiffres le lendemain : 2.337.000 spectateurs furent au rendez-vous. Hélas, le replay de l’émission est déjà sorti des plateformes !

Le coq bec ouvert

“Le coq de la flèche est devenu le symbole de la renaissance de Notre-Dame” entend-on dès la bande-annonce de l’émission. Je suis frappée par la justesse prophétique de la phrase prononcée par Carole Gaessler. Et le moment dédié au coq sera en effet très fort. Bien sûr, on est ému devant la blancheur de la “Vierge au pilier” les gravats noirs à ses pieds… Bien sûr, on est ému devant ces rosaces que le feu n’a pas réussi à atteindre.

Mais ce coq… Ce coq riche de reliques, qu’un drone nous fait voir conquérant, donnant fièrement la direction, queue épanouie, et bec ouvert pour annoncer la fin de la nuit et la promesse de l’aube, le voilà tombé à quarante mètres de la flèche en feu. On le croyait perdu ; il a été retrouvé. Tout déformé par le feu, la queue désormais complètement ramassée, comme s’il ne pouvait plus donner de direction, il garde avec difficulté le bec toujours aussi ouvert, comme toujours prêt à chanter l’aurore. En Dordogne, l’équipe de restauration pense d’ailleurs laisser les “stigmates” de sa souffrance comme haut témoignage de la fournaise de ce 15 avril 2019.

Et je me souviens alors d’une conférence de George Steiner dans Passions Impunies. De ce coq que le professeur à Oxford avait analysé lors de sa brillante comparaison de Jésus et de Socrate. Les derniers mots de Socrate avant de mourir concernait en effet un coq, celui qu’il doit faire sacrifier à Esculape, à ce fils d’Apollon qui ressuscite les morts, la dette à payer pour le passage. Mais aussi le coq de l’Évangile, celui qui n’a pas le temps de chanter deux fois avant que Pierre ne renie trois fois le Christ, le Verbe de Dieu, Lumière. (1)

Le coq eschatologique

Le symbole du coq est puissant, eschatologique : le feu de l’incendie, quasi apocalyptique, infernal, n’a pas eu raison du coq chrétien. Annonçant le jour, chaque jour, mais aussi le dernier avec la venue du Christ, le coq, appartenant également à la symbolique de l’islam, n’a pas fondu, n’a pas disparu. L’aube d’un jour nouveau doit rester la ligne d’horizon où tourner le regard et le cœur. Le coq supplicié de Notre-Dame en est revenu pour nous la rappeler : le Christ viendra alors juger les vivants et les morts. Nul ne sait le jour ni l’heure.

Loin de l’emblème patriotique ou de la mascotte sportive, le coq de Notre-Dame est signe d’une espérance chrétienne rappelée au cœur du doute et du reniement. Sachons, reconnaissants, lire ce beau signe des temps !

(1) Sur le “retour du maître” : “Veillez donc, car vous ne savez quand viendra le maître de la maison, ou le soir, ou au milieu de la nuit, ou au chant du coq, ou le matin” (Mt., 13, 35)

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Mini vidéos du compte Facebook de l’émission Des Racines et des Ailes.

Activer le son au bas de la vidéo.

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